C'est dans cet ouvrage fondamental, dont la version allemande date de 1976, que Jürgen Habermas, dernier représentant en date de l'Ecole de Francfort, fixe les bases de sa théorie de la communication.
Recueil d'articles ou de conférences, cet essai décisif s'inscrit dans un mouvement de critique et d'approfondissement de l'analyse marxiste de la société, profitant entre autres de l'apport nouveau des sciences sociales.
Il s'agit ici de fonder une politique qui s'enracinerait d'abord dans le langage et tendrait à libérer le sujet de tous les faux-semblants de l'idéologie faisant obstacle à une communication libre.
Jürgen Habermas, né en 1929, est sociologue et philosophe. Sa pensée, opposée tant à une vision technocratique du monde qu'au marxisme bureaucratique des pays de l'Est, prend sa source en particulier dans les travaux de Adorno et de Horkheimer.
De l'usage public des idées réunit les principales interventions publiques du philosophe allemand au cours des années 1990.
Uintérêt de ces interventions est double. D'une part, elles révèlent comment Habermas a appréhendé, mois après mois, les changements capitaux intervenus au cours de la décennie : effondrement du pôle soviétique, réunification allemande, accélération de la mondialisation et émergence de nouvelles tensions. Mais elles montrent également comment l'oeuvre a trouvé à s'exprimer et à se déployer face à ces transformations.
C'est ainsi qu'on trouvera dans De l'usage public des idées une actualisation des thèmes classiquement abordés par Habermas (à propos de l'usage de l'histoire, de l'Allemagne, de Carl Schmitt, de Walter Benjamin, d'Adorno) en même temps que l'ensemble des réflexions qui l'ont conduit à renoncer à la perspective nationale au nom d'une ouverture cosmopolitique rendue nécessaire, à ses yeux, par la mondialisation de l'économie.
Après les bouleversements des années 1990, le monde se recompose. Mais les transitions, qu?on annonçait faciles, se révèlent laborieuses, malaisées et, dans certains cas, porteuses de menaces plus que de promesses.
Présentée comme le triomphe de la démocratie sur le totalitarisme, la victoire du monde occidental n?a été contestée ni dans son effectivité, ni dans sa légitimité. Mais, on le sait, plus une légitimité est forte, et plus elle suscite des attentes qui ne souffrent pas d?être déçues ; or, il semblerait qu?on ait pris le parti d?y répondre dans la seule langue du marché.
A l?échelle européenne, sans que l?on puisse parler d?échec, la réunification allemande n?est pas aussi facile à réaliser que certains l?avaient cru, et il n?est pas impossible que l?Union européenne ait, elle aussi, à souffrir d?avoir sous-estimé, en s?élargissant, l?insolubilité de l?histoire dans l?économie notamment si elle tarde (ou, pire, si elle échoue) à se doter des moyens de son intégration politique.
Par ailleurs, à l?échelle mondiale, on sait depuis le 11 septembre 2001 que la globalisation sans frein du marché et l?hégémonisme arrogant de l?Occident engendrent bien plus que des résistances.
Tels sont les principaux thèmes abordés par ces écrits politiques, rédigés entre 1998 et 2003. Autant de plaidoyers en faveur d?une politique animée par les principes de justice et de démocratie.
On trouvera, en outre, dans ce recueil les textes qui furent à l?origine de la réflexion récente de Jürgen Habermas sur les problèmes de la médecine reproductive face à l?individualisme marchand.