« Elle trouve refuge dans une petite grotte érigée au fil des décennies avec des mots, des images et des chansons, l'art, un bien grand mot, la beauté des choses qui la bouleverse lui sert de kaléidoscope pour observer les jours et les gens. Ainsi le quotidien paraît moins féroce aux yeux de cette sentimentale désenchantée. ».
Anna, la narratrice de ce roman à la mélancolie aigre-douce façon Sagan, se débrouille comme elle peut avec la vie. Plutôt mal. Elle encaisse. Elle en rit même. Elle se souvient, aussi. Coincée entre une mère féministe mais atteinte d'une forme de joyeuse démence, trois filles à l'adolescence woke, un mari au sourire fuyant et à la tenue fluo, un cordon sanitaire d'amies, Anna pourrait crier, comme on joue, comme on pleure, « Arrêtez tout ! », mais ça ne marche qu'au cinéma.
Comment font les gens ? Pour tout faire ? Pour ne pas être entamés par le malheur ambiant ? Pour mener leur vie avec tant de certitude ?
Chacun se retrouvera dans ce roman universel, où se confondent chagrins et souvenirs.
« Les mots des autres m'ont nourrie, portée, infusé leur énergie et leurs émotions.
Jusqu'à la mort de mon frère, le 14 octobre 2015 à Montréal, je ne voyais pas la nécessité d'écrire. Le suicide d'Alex m'a transpercée de chagrin, m'a mise aussi dans une colère folle. Parce qu'un suicide, c'est la double peine, la violence de la disparition génère un silence gêné qui prend toute la place, empêchant même de se souvenir des jours heureux.
Moi, je ne voulais pas me taire.
Alex était un être flamboyant, il a eu une existence belle, pleine, passionnante, aimante et aimée. Il s'est battu contre la mélancolie, elle a gagné. Raconter son courage, dire le bonheur que j'ai eu de l'avoir comme frère, m'a semblé vital. Je ne voulais ni faire mon deuil ni céder à la désolation.
Je désirais inventer une manière joyeuse d'être triste.
Les morts peuvent nous rendre plus libres, plus vivants. » O. L.