En offrant aux Zapara le rêve pour communiquer avec lui, le démiurge Piatsaw leur a permis de penser le monde, de retrouver la connaissance et la mémoire, et d'envisager l'avenir - la nuit permettant d'atteindre l'essence des choses et de dépasser les frontières du temps et de l'espace.
En Equateur, les Zapara recherchent désormais dans les visions oniriques les réponses aux questions que leur pose l'existence, qu'il s'agisse d'un accord politique à trouver ou d'un événement historique à comprendre. Profondément ancrée dans le quotidien, l'expérience du rêve est ainsi constamment interrogée par les Indiens Zàpara pour faire face aux nouveaux défis de la mondialisation.
En Chine, la place accordée à la musique ne peut que nous surprendre.
A la fois ferment de la légitimité politique et symbole du pouvoir, la musique est étroitement liée au domaine politique. Les dirigeants en ont non seulement fait grand cas mais un formidable réseau d'institutions musicales a également été mis sur pied. Grâce à une analyse fine, il a été possible de mettre en évidence leurs fonctions. Appelés à collecter les musiques de Chine, la dizaine de milliers de fonctionnaires qui y travaillent oeuvrent de fait à la fabrication d'une musique nationale chinoise.
La tradition laisse alors place au traditionalisme d'Etat. C'est au travers de la musique ouïgoure que cette incroyable alchimie a été comprise. Musique heptatonique jouée principalement sur des vièles et des luths, elle s'inscrit dans le monde musical irano-arabo-türk. Pourtant elle aussi a été intégrée dans cet extraordinaire florilège qu'est la musique de Chine. Comment et pourquoi c'est ce que ce livre tente aussi d'expliquer.
Comment peut-on être matrilinéaire ? Comment vivre dans une société où la filiation et les biens passent uniquement par les femmes ? Comment les hommes s'accomodent-ils de la résidence du couple chez l'épouse ?
Dans l'archipel des Comores, l'île de Ngazidja révèle des situations inédites où la matrilinéarité s'entremêle avec des principes contraires. La société est musulmane, les grandes fêtes de l'islam rythment le calendrier, le mariage est contracté devant le cadi. Et grâce au système d'âge d'origine africaine, les hommes s'organisent en une assemblée politique qui gouverne la cité.
Dans le Mexique indien, les ténèbres sont le théâtre d'expériences sensorielles violentes. Les humains y sont confrontés au retour des ancêtres, à la résurgence de forces inquiétantes. Elles suscitent des "visions", rencontres fugaces avec ces entités venant saturer tant le monde sauvage que l'espace domestique, envahissant les rêves et le sommeil.
Chez les Otomi orientaux, la nuit appartient au féminin, "ce qui épouvante". En conséquence, le chamane, "celui qui sait", découpe patiemment des cohortes d'idolos, représentant les "maîtres du grand noir" et leurs assistants, afin de négocier avec ces prédateurs de fragiles armistices, capables d'endiguer tous les crimes rituels qui menacent les humains. Ils font de la nuit un véritable laboratoire de recréation du vivant, et des Otomi les penseurs d'une étourdissante philosophie de l'obscurité.