« Tu voudrais tout connaître de lui. Où il habite, comment sont ses parents, ce qui le rend heureux. Savoir s'il lit, comme toi, en cachette, tard dans la nuit. Tu aimerais lui parler des romans que tu dévores, lui raconter tes héros préférés et ces passages que tu relis sans cesse car ils te font trembler de peur ou d'allégresse. Bref, tu as un amoureux. »J'avais envie d'écrire sur l'enfance, ce soi-disant paradis perdu que les adultes regrettent aveuglément. Je voulais m'approcher au plus près. Entendre. Me rendre témoin des désirs les plus singuliers, des rencontres fâcheuses ou heureuses, de ce moment fragile où émerge une subjectivité. Et, page après page, montrer ce que signifie être un petit dans un monde taillé pour les grands.Les héros de mes nouvelles sont des enfants ordinaires. C'est vous, c'est moi, le camarade d'école, la voisine du dessous. Ils pourraient passer inaperçus. Ils ne sont pas instagrammables. Par leurs trouvailles et le puissant désir qui les porte, ils s'inscrivent avec vigueur dans l'existence, en bravent la férocité. Ils ne sont pas des êtres en devenir mais des petits sujets. Ils sont déjà là. Et ils comptent ! Les entendez-vous ?
Une femme sans âge, prise tel un insecte dans la toile gluante des mots. Entre le buffet et l'évier, elle parle.
Dit tout ce qui lui passe par la tête. Par le corps.
La rancoeur, le dépit, l'envie.
Le désir piétiné.
L'amertume et la désillusion.
Elle parle. Elle ne sait pas se taire.
Elle parle à sa fille, cette gamine à la bouche pleine.
De pain. De viande. Et d'impuissantes larmes.
Elle parle à qui veut l'entendre.
Personne, à l'évidence.
Parfois, elle se parle à elle-même.
Se parle mais ne s'entend pas dire.
Rage et désespoir l'assourdissent.
Elle parle, la mère.
Elle crie, elle crache.
Sa haine de l'autre. Et d'elle-même.
L'enfant doit savoir la vie volée.
Gaspillée dans l'incessante répétition.
Le sacrifice auquel elle a consenti.
L'autre doit connaître la douleur et le gâchis.
Au prix du ravage, l'indicible sera dit.
Tant pis.
L'histoire de ce roman aux frontières du polar et du roman noir se déroule de 1988 à 2020 entre la Bretagne et « Certeuil », une ville imaginaire au modèle bien réel de la couronne parisienne. Jean Leguen, le personnage principal, vit dans le Finistère sud mais il est né et a grandi au coeur de la cité des Rémouleurs, un quartier « chaud » de la ville. La quarantaine passée, il survit sur la côte bretonne en s'échinant à des petits boulots, en négligeant sa vie familiale et professionnelle. Il est devenu un zombie vindicatif et velléitaire fuyant ceux qui lui veulent du bien. Un article de journal le renvoi à son passé dramatique. Ce sera le moteur de l'intrigue. Leguen, en proie à un mal être grandissant, revient dans un Certeuil où le climat social est à l'émeute. Son arrivée dans cette banlieue provoque une série d'événements violents qui l'obligent à sortir de sa réserve. Il conduira ses anciens et nouveaux amis à l'aider, au péril de leur vie.
Amandine, contrainte de travailler sur une ligne de production, rêvait parfois de campagne, souvent d'un compagnon de route. Elle profita d'un accident fort louche pour traîner Milo dans sa tanière. Le trentenaire, féru d'humour noir, cultivait les zones d'ombre, mais ne tombait dans aucun panneau.